Douleurs chroniques et émotions – Bibliothérapie & Vidéo
Le professeur Anne-Françoise Allaz nous invite à intégrer les émotions dans le traitement de la douleur chronique.
La Professeur Anne-Françoise Allaz est membre de l’Académie de médecine suisse et du conseil de l’Association européenne de médecine psychosomatique (EAPM). Cette spécialiste propose un ouvrage : « Douleurs et émotions ». Ce livre est paru en 2021par les éditions VIGOT.
« La compréhension et les traitements de la douleur ont beaucoup progressé au cours des trois dernières décennies. En particulier, la reconnaissance et la prise en considération de sa complexité ont ouvert des possibilités jusque-là méconnues pour mieux la soulager.
Ce livre se compose de trois parties au cheminement progressif :
- La première partie du livre consiste en une présentation détaillée des connaissances contemporaines dans les domaines de la douleur, des émotions et de leurs liens étroits.
- Les particularités des douleurs chroniques sont abordées dans la deuxième partie. Elles sont décrites en détail et l’autrice explique lesquelles d’entre elles sont réversibles.
- La dernière partie, plus pratique, insiste notamment sur l’importance de l’écoute et de l’empathie de la part des proches et des soignants. »
Voici un lien vers sa conférence « Douleurs chroniques : des neurosciences aux émotions » (2022).
Voici quelques notes issues de la conférence :
La douleur implique une lecture sensorielle ET émotionnelle. Tout signal de la douleur sera analysé sur le plan cognitif, affectif et motivationnel. La douleur est donc toujours comprise dans cette double valence. Les neurosciences l’ont parfaitement confirmé.
Nous avons de nombreuses possibilités d’activer les circuits inhibiteurs descendants comme le la distraction, l’anticipation positive, l’auto-hypnose, la sensation de pression que l’on peut appliquer, etc.
La douleur chronique implique le phénomène de « sensibilisation centrale » soit une imprégnation des circuits douloureux par un excès de douleur ou par des événements émotionnels. Le Professeur Anne-Françoise Allaz nous permet de mieux comprendre le phénomène de sensibilisation centrale. C’est comme si vous mettiez votre pouce dans de la pâte à modeler. Cette trace est ce que l’on appelle la « sensibilisation centrale ». Il s’agit d’une sorte d’abaissement des seuils de la douleur, une dérégulation des circuits inhibiteurs. La personne se retrouve alors dans une situation où toute sensation peut être perçue comme douloureuse. Nous sommes dans un système nerveux qui est sous alarme maximale. « Pensez aux alarmes des voitures qui se mettent à sonner quant il y a beaucoup de vent. »
L’anxiété est l’un des affects souvent associés à la douleur. L’anxiété génère une hypervigileance aux sensations. Cela peut aboutir à une kisésiophobie soit un évitement de toute mise en mouvement de peur de générer ou d’alimenter la douleur.
La dépression est très souvent associée à la douleur. Le fait d’avoir des affects dépressifs rend vulnérable à la douleur et la douleur peut rendre dépressif. 20 à 50% des personnes souffrant de douleur chronique sont déprimés. Les affects dépressifs abaissent le seuil de la douleur.
Les traumatismes infantiles, maltraitance, abus, abandon, négligences infantiles peuvent créer une vulnérabilité à la douleur. Ils laissent des traces dans cette pâte à modeler du circuit douloureux. Le Professeur Allaz relève que ces traumatismes :
- Ont un effet de résonnance lors d’un nouveau traumatisme, même mineur ;
- Créent une empreinte, un souvenir, dont la mémoire est désorganisée, fragmentée, parcellaire, faite d’émotions et de sensations physiques. Cela peut être tellement parcellaire que le traumatisme peut être connu du corps mais plus de l’esprit de la personne.
- Bien souvent la plainte est présentée par le biais de la douleur corporelle plutôt que du souvenir traumatique. Le souvenir traumatique n’accède pas facilement à la conscience.
Le Dr Allaz nous invite à considérer les douleurs chroniques comme un problème en soit et non pas seulement comme un simple signal d’alarme de quelque chose qui serait persistant. Il faut partir de l’idée de facteurs de maintien complexes. Les facteurs émotionnels sont des facteurs extrêmement importants. Il y a lieu de retravailler l’empreinte du pouce. Ce remodelage passe par la prise en compte des dimensions émotionnelles et des dimensions historiques personnelles.
C’est une histoire individuelle. Chaque personne a sa douleur et son histoire avec la douleur. Il est fondamental de pouvoir accueillir, accepter la douleur. Il est important d’avoir la meilleure qualité de vie possible malgré les douleurs.
Prendre en considération l’aspect émotionnel permet d’activer de nombreuses ressources qui permettent d’aller mieux.