Pornographie et recul critique des adolescents
Je me suis véritablement délecté de la lecture du travail d’Eviane Schüpbach « sexualités des ados : quelles représentations et quels enjeux ? » Ce travail a été défendu en 2023 dans le cadre d’un DAS (Certificate of Advanced Studies) en Santé Sexuelle (Haute Ecole de Travail Social de Genève). Je prends la liberté de vous en partager certains extraits.
« Dans leur ouvrage, Amsellem-Mainguy et Vuattoux (2020) expliquent que l’influence de la pornographie est forte dans les moments de découvert de la sexualité, puis une distance critique se met peu à peu en place. Tous les jeunes n’ont pas les mêmes moyens afin de pouvoir créer une distance critique avec la pornographie. D’après cette étude, les filles semblent développer davantage de compétences réflexives que les garçons et ces compétences sont davantage présentes chez les jeunes issus de milieux sociaux favorisés. Les adolescentes des classes aisées sont donc les plus aptes à prendre du recul vis à vis des films pornographiques qui mettent en scène de la domination masculine, et cette distance augmente au fil des années.
Dans l’émission La Zone Mazaurette (21 janvier 2022), Maïa Mazaurette répond à la question de la journaliste Caroline Roux : la pornographie influence-t-elle la sexualité des ados ? En s’appuyant sur les études les plus récentes, dont celles présentées ci-dessus, elle confirme que la consommation de pornographie arrive de plus en plus tôt, l’âge moyen est passé de 15 ans et 8 mois en 2008 à 14 ans et 5 mois et 2018. L’âge moyen du premier rapport sexuel reste cependant le même depuis 1995 : un peu avant 17 ans. Pour 70% des jeunes c’était le bon moment (Barrense-Dias et al. 2018). La consommation de pornographie n’a visiblement pas d’effet sur l’âge du premier rapport sexuel, mais elle influence notablement les manières de l’explorer, puisque plus de la moitié des ados ont essayé à un moment de reproduire ce qu’iels y ont vus. Cependant, comme le précise Mazaurette, le porno est problématique uniquement lorsqu’il n’y a pas de contre-modèle de sexualité. Or, ce n’est que rarement le cas actuellement puisque d’autres modèles sont visibles dans les films, les séries, les livres et d’éventuelles conversations avec des ami·e·s, les parents ou d’autres adultes de référence. »
Sexualités des ados : quelles représentations et quels enjeux ? – Eviane Schüpbach – 2023